Derniers seigneurs de GOUGNIES


Le dernier seigneur de Gougnies (relief le 13 janvier 1780) fut Jean-Baptiste Alexandre Ghislain de Sire, né en 1742, fils aîné de Pierre François Charles de Sire (1703-1766) et de Marie Alexandrine LEBRUN (1723- 1779).
                             
En 1605, son 4e aïeul, François Le Sire, sans doute seigneur foncier du lieu, avait relevé «la hauteur du village de Gougnies», en vertu d'une donation des archiducs Albert et Isabelle, destinée à récompenser ses services militaires: le prix en avait été de 1.000 livres, plus une rente annuelle de 100 livres. Le nom de Le Sire se transforma dans la suite en de Sire (avec des variantes: Desire, de Sir, De Cir).

La seigneurie (dénombrement du 15 janvier 1780) consistait en :


haute, moyenne et basse justice, la Cour ayant droit aux amendes, confiscations et forfaitures;
  droit de la moitié du vingtième denier en cas de vente de biens-fonds, l'autre moitié allant au seigneur foncier;
  droit de chasse et de pêche;
  droit de mortemain à l'égard des non-bourgeois et des non-ferons (maîtres de forges) ;
  droit de bourgeoisie: 8 florins (autant de la Cour) pour tout étranger aux terres de S.M.; 3 florins (autant à la Cour) pour les sujets de S.M.; le relief de bourgeoisie étant de 9 sols (plus 9 sols à la Cour) ;
  droit de congé de mariage: 5 sols; «si les garçons sont du lieu ils ne paient rien, à moins qu'ils ne prennent une fille de l'endroit. ;
  droit d'afforage : 16 pots de bière sur chaque brassin acheté par les cabaretiers;
   

cens seigneuriaux:
   1. à la Saint-Rémy, chaque manant devait un setier d'avoine. mesure de Namur, une poule et dix liards, les veuves la moitié; les laboureurs et veuves tenant labour : 4 setiers d'avoine, une poule et 5 sols, sauf s'ils étaient ferons, à la condition de ne pas être en même temps cabaretiers; les habitants de Neversquoy (juridiction de Presle, pays de Liège) devaient un setier d'avoine, mesure de Namur, pour le droit de pâturage de leurs bêtes (chèvres exceptées) sur Gougnies ; les communs habitants de Gougnies: une somme globale de 5 fl. 6 s. 16 d. pour le droit de pâturage de leurs vaches;
  2. le 2 janvier, 6 fl. 11 s. 8 d. ; 14 setiers 1 quarte d'épeautre ; 2 quartes d'avoine; 3 livres 1 quarteron 1/2 de lin, à 20 sols la livre (soit 1 fl. 13 s. 18 d.) ; deux poulets et quatre chapons dus par différents propriétaires;
   un petit bois, nommé le bois le Comte, de 4 bonniers, à Gougnies ;
   une prairie à une herbe, dite Rensomprez, de 3 bonniers 286 v. 3/4 à Sart-Eustache.

Ce dénombrement ne mentionne ni le château ni la ferme du château qui, depuis longtemps, appartenait à la famille de Sire et ne faisait pas partie de la donation des archiducs.
   

Les charges étaient:
   100 florins de rente annuelle à la recette de S. M. ;
   10 setiers d'épeautre à la seigneurie foncière de Gougnies (du moins en principe, car elle était possédée par le seigneur hautain).
 

Gougnies avait une chapelle, dédiée à Saint Rémy; un bénéfice y était annexé dont le collateur était le curé de Gerpinnes. En 1753, la chapelle fut érigée en vicariat, ce qui dispensait les habitants de se rendre à l'église paroissiale pour les cérémonies du culte.
 

Gougnies avait aussi un ermitage; le dernier ermite connu est le frère Raphaël FERAILLE, dont le nom figure au recensement de 1763 ; celui de 1777 ne mentionne pas d'ermite, ce qui fait supposer que l'ermitage était déjà abandonné; on sait qu'en 1783 Joseph II ordonna la suppression de tous les ermites des bois et des campagnes, à cause des «inconvénients qui en résultent».

Les recensements de la population donnèrent les résultats suivants:

 

 

1763

 1777

1786

ménages

51

57

-

habitants

185

243

283


 Les familles GRÉGOIRE, CARAMIN et DOUILLET étaient celles qui comptaient le plus de représentants.
 

La situation de fortune des habitants ne nous est pas connue; un acte de 1760 signale «51 manants y compris 2 propriétaires qui ont du bien suffisamment pour avoir voix», sans préciser d'avantage.
     

l y avait en tout cas deux biens importants: celui du château, appartenant au seigneur, dont le fermier était, en 1791, Jean-Baptiste CHAUDRON; et la cense de Comagne, qui, en 1791, appartenait à Antoine FALQUE, brasseur à Biesme, et était louée à Jean-Joseph DECLAYE de Gougnies, et à Toussaint MOREAU de Presle.
     

Sur la composition de la Cour de justice, nous avons recueilli les renseignements suivants:
     9 avril 1760 : Jean Roch DOUILLET, maïeur ; Benoît WAUTHY, Jean Mathieu CORNET, échevins ; A. FALQUE, greffier.
     19 décembre 1760 : Jean-Jacques QUINARD, Jean Mathieu CORNET, Benoît WAUTHY échevins.
     21 février 1767: Benoît WAUTHY, Jean-J. CARAMIN, Antoine PIRET, échevins.

     10 juin et 26 août 1780 : Jean-Roch DOUILLET, maïeur ; Benoît WAUTHY, J.-C. BRAIBANT, échevins; A.-J. PIRET, échevin et greffier. Jean-Roch DOUILLET mourut en 1789 ; son successeur ne nous est pas connu.

Gougnies était l'un des centres industriels de l'Entre-Sambre-et-Meuse.

Jean-Baptiste LEBRUN, né à Marchienne-au-Pont en 1729, beau-frère de Pierre François Charles de Sire, y était maître de forges. Le 16 août 1779, quelques heures avant sa mort, il céda «sa forge dite d'en bas, son makat...» à son neveu Alexandre Ghislain de Sire «moyennant une pension annuelle ou rente viagère de sept cents florins» ; il vendit «sa forge dite d'en haut et son fourneau...» à Nicolas Joseph LORENT, négociant à Châtelineau, pour la somme de « 15.215 florins courant de Brabant » ; enfin il fit son testament en faveur d'Alexandre Ghislain de Sire.
Des actes de 1788 et 1791 font état d'une forge «dite du milieu», appartenant au seigneur et donnée en location.
 

En 1791, celle d'en haut, devenue propriété de la famille de Sire, était louée au sieur De Cossée, résidant à Marchienne-au-Pont.
 

Le 16 juillet 1792, Joseph PUISSANT de Charleroi, acheta aux de Sire «pour 35.000 florins argent courant de Brabant, «les usines de Gougnies consistantes en un fourneau avec sa chippre, deux forges avec leurs chippres, trois bocarts, macats, étang, maison, écuries et autres bâtiments, jardins, bosquets, terrains, aisances, servitudes actives et passives, appendices et dépendances, le tout tel qu'il se contient, rien réservé ni excepté».
                                                                   

Albert DESTRAY

 

Source de la revue historique de l'Entre-Sambre-et-Meuse "l'Antiqvaire " n° 1 du 1er trimestre 1966